Macronie mal à droite?


La macronie est-elle condamnée à tomber à droite, après les élections européennes ? Tout tend à donner corps à cette hypothèse. Les dernières lois ou projets : retraites, immigration, orientations agricoles, indemnités chômage et maintenant réforme de la fonction publique pourraient en être les signes annonciateurs… Les media, mais aussi les partis politiques, tout comme les syndicats veulent y voir un tournant, comme une reddition en rase campagne aux idéologies des droites, voire de la droite extrême, ce qui sonnerait la fin définitive du « en même temps » qui fut la marque de fabrique du macronisme. 

Aujourd’hui, plus personne ne veut reconnaître ses rejetons conceptuels dans ce que le Président de la République continue d’appeler un pragmatisme de bon aloi. La gauche, embarquée sur la galère NUPES, ne trouve aucun mérite, aucune vertu aux différents gouvernements. Même le fameux « quoi qu’il en coûte » qui a coûté si cher et permis à des milliers d’entreprises et des centaines de milliers de salariés de traverser la période covid sans perdre trop de plumes, aussitôt relayé par la séquence « pouvoir d’achat » est désormais l’objet de toutes les critiques. Trop dispendieux, pas assez ciblé, trop ceci et pas assez cela, le « quoi qu’il en coûte » qui était pourtant l’expression d’une politique keynésienne, devient, mutatis mutandis, le responsable du déficit budgétaire, symptôme du mal endémique qui accable la France depuis des lustres. Ravie de l’aubaine, la bonne vieille droite déchiraquisée et tout aussi déboussolée, relève le menton, endosse la défroque du père la rigueur et fustige à tout va les choix de Macron qui pourtant empruntent de plus en plus souvent à sa philosophie.

La macronie, qui pensait couper l’herbe sous les pieds du RN en droitisant son discours a de fait perdu le cap. Ses tentatives désespérées pour se concilier à l’Assemblée nationale les bonnes grâces des rescapés UMP de 2022, prennent un tour pathétique et contre-productif. Ces derniers ont compris qu’ils pouvaient, à défaut de se refaire la cerise, exercer un réel pouvoir de nuisance. Ils ne s’en privent pas, alors que peu à peu, à bas bruit, la gauche macroniste s’évanouit dans la nature. TDP, Territoires de progrès, un mini-mini parti censé donner à la majorité présidentielle sa jambe gauche, donc sa force de frappe populaire, s’est comme évaporé dans les brouillards de printemps.  Il n’apparaît même pas sur les affiches de la campagne européenne quand Modem et Horizons se disputent la lumière avec Renaissance! TDP est un mirage. Jamais montré, jamais invité, jamais cité, pas même par les ministres à l’origine estampillés à gauche ! Il est un mirage dans un désert idéologique !                                                                              

Les sondages qui se multiplient à l’approche du scrutin du 9 juin, confirment tous cette perte de substance. Valérie Hayer qui n’a toujours pas fait connaître sa liste Renaissance est à la peine. Très loin derrière le RN, elle est presque menacée, pour la deuxième place par R. Glucksman qui, divine surprise pour un PS étique qui n’en espérait pas tant, ratisse bien au-delà des socialos, et chez les écolos et chez les macronistes. Il faut dire que ces derniers, recroquevillés sur leur bilan bruxellois dont ils n’ont pourtant pas à rougir, ont fait de la guerre en Ukraine et de la dénonciation du RN leur principal argument de campagne. Est-ce suffisant ? A l’évidence non. D’autant que ce scrutin s’annonce, tout du moins en France, comme un tour de chauffe national. Et sur ce terrain le Président, le gouvernement, les parlementaires, Renaissance, incapables de se partager les rôles, font preuve d’une curieuse maladresse, à moins que ce ne soit l’expression d’un choix in fine assumé. Un exemple ? La réforme de la fonction publique. Nécessaire certes, mais pourquoi, dans la communication officielle, agiter en premier le spectre des licenciements ? Autre exemple, la réduction du déficit. Souhaitable, indispensable bien sûr ! Mais pourquoi faire des chômeurs et assurés sociaux les boucs émissaires favoris de la situation ? Quid du volet recettes, des profits démesurés de certaines sociétés, de la bourse où les compteurs explosent ? And last, but not least, cette loi agricole et son fumet de populisme agraire, et les vilaines manières qu’elle promet à la lutte contre le changement climatique pourtant décrété priorité du quinquennat…

« Ce n’est pas la girouette qui tourne mais le vent » disait Edgar Faure. Mais à trop louvoyer, on perd vite le cap par gros temps, obligeant ses navires à se réfugier dans un havre (vous avez dit Le Havre) « sécure » pour ne pas dire sécuritaire. Pas étonnant dès lors que la jeunesse, toutes illusions perdues, lève l’ancre pour des horizons qui continuent à se dérober à elle ! Ainsi en va-t-il, plus globalement des électorats sociaux-démocrates qui fatigués des oukases mélenchoniens, cherchent dans une cacophonie désespérante une voix et les moyens d’exister par eux-mêmes. Décidément, l’après européennes pourrait nous réserver bien des surprises. 

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